Fiche Outils : Quelques bases juridiques

 

Le droit et l’activité économique

1. Activité économique et droit

1) La nécessité d'un cadre juridique pour les acteurs de la vie économique
Le droit (appelé droit objectif) est l'ensemble les règles générales et obligatoires applicables dans un État.
Il naît et s'enrichit corrélativement au développement de la société qui le fonde. Sa fonction initiale est, en effet, d'assurer l'ordre social, de limiter les conflits entre individus. Au-delà de cette finalité première, le droit relaie certains principes moraux (sanction du non-respect des bonnes moeurs, par exemple).
Plus généralement, le droit est le vecteur des idées économiques et sociales de chaque époque.
L'activité économique concerne, selon une définition classique, tous les faits de production, répartition, échange et consommation de richesses.
Tous les acteurs de la vie économique ont besoin d'un cadre juridique qui leur permette d'exercer et de développer leur activité.
Dans un système d'inspiration libérale, le droit aura une position minimale, assurer « l'ordre social économique » en protégeant les libertés : liberté du commerce et de l'industrie, liberté du travail...
Avec l'évolution des doctrines économiques et sociales, le droit va avoir une place de plus en plus importante dans l'activité économique : protection du salarié, du consommateur... Le droit des affaires est donc l'ensemble des règles de droit qui constituent le cadre juridique dans lequel sont tenus d'évoluer les acteurs économiques. Ces règles ont leur source dans le droit commercial, le droit social, le droit pénal...

2) L’interdépendance du droit et de l'économie
Dès l'origine, le Code civil portait en lui les bases du développement d'une économie libérale. La définition d'un droit de propriété absolu et le principe d'« autonomie de la volonté », selon lequel tout individu étant naturellement libre ne peut être obligé par un acte juridique que s'il est voulu, sous-tendent toute notre économie de marché. Par la suite, notamment au moment de la révolution industrielle, puis dans les années soixante avec le début de l'intégration européenne, le droit a toujours accompagné le développement de notre économie libérale. Ainsi furent définis les principaux statuts des sociétés commerciales et posées les règles devant encadrer la concentration des entreprises.
Aujourd'hui, avec la mondialisation, l'économie semble prendre le pas sur le droit. Le droit saura-t-il évoluer pour encadrer le phénomène de mondialisation ou au contraire se contentera-t-il de valider a posteriori toutes les évolutions prévisibles de notre système économique ?


2. Les libertés publiques économiques et sociales

Les libertés publiques sont les droits fondamentaux de la personne humaine juridiquement reconnus et protégés.
Elles trouvent leur source, au plan national, dans la Constitution de 1958 et par voie de conséquence dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et dans le Préambule de la Constitution de 1946.
1) Les principales libertés
i. La liberté du commerce et de l'industrie
Les libertés économiques, fondement du système capitaliste, découlent de la liberté du commerce et de l'industrie. Il s'agit notamment : - de la liberté d'entreprendre - de la liberté de contracter - de la libre concurrence.
ii. Les libertés sociales
Les libertés sociales tendent à atténuer les excès du libéralisme. On citera :
- la liberté du travail
- la liberté syndicale
- le droit de grève.
2) Des restrictions la notion d'ordre public économique ou social.
L’ordre public est l'ensemble des règles impératives régissant l'organisation politique, économique et sociale d'un État et les droits fondamentaux des citoyens.
L'ordre public économique est l'ensemble des lois qui donnent aux pouvoirs publics les moyens d'agir sur l'économie. On distingue habituellement :
L’ordre public de direction qui permet d'assurer la protection des intérêts généraux de la nation. Il s'exprime surtout par le biais du droit économique : réglementation des prix, encadrement du crédit, etc. Il a plutôt pour effet d'imposer des choses.
L’ordre public de protection qui prend en compte la situation de certaines catégories de particuliers qui méritent d'être protégés. Ainsi, les consommateurs, les salariés dans leur rapport avec les employeurs, les incapables, etc. Il a plutôt pour effet d'interdire.
L’ordre public social correspond à la protection minimale du salarié. Il repose essentiellement sur le principe suivant : en droit du travail, une disposition conventionnelle ne peut déroger à une disposition légale que dans la mesure où elle est plus favorable au salarié.

Les sources internes du droit

1. La diversité des sources du droit.

a. La Constitution
La Constitution regroupe les règles de droit fondamentales fixant l'organisation de l'État, et affirmant les libertés et les droits garantis aux individus et aux groupes sociaux. Elle occupe la place la plus élevée au sommet de la hiérarchie dans la mesure où toutes les autres sources internes du droit doivent lui être conformes.
La révision de la Constitution est soumise à une procédure particulièrement lourde qui limite les possibilités de révision.

b. La loi
La loi est le texte voté par le Parlement, Assemblée nationale et Sénat. L’article 34 de la Constitution décrit la liste des matières dans lesquelles la loi peut fixer des règles.
La procédure législative comprend trois étapes : l'initiative, qui appartient à la fois au Gouvernement et aux parlementaires, la discussion et le vote, qui doit en principe être réalisé dans les mêmes termes par les deux chambres, et la promulgation et la publication de la loi, qui permettent son entrée en application.

c. Les textes réglementaires
Les textes réglementaires sont les textes (décrets ou arrêtés) adoptés par le pouvoir exécutif ou une autorité administrative.
Ces textes réglementaires peuvent être des textes d'application des lois ou se rattacher à l'exercice du pouvoir réglementaire autonome.

d. La coutume
La coutume résulte d'un usage général et prolongé faisant naître une règle reconnue comme étant le droit.
Les usages résultent d'une pratique répétée, généralement dans un champ professionnel bien défini.

e. Les conventions collectives
Les conventions collectives et les accords collectifs sont des dispositions écrites ayant vocation à organiser tout ou partie des relations de travail.
Ces accords peuvent être négociés au niveau national, régional, local, au sein d'une entreprise, d'une branche, voire au niveau interprofessionnel.

f. La jurisprudence
La jurisprudence est constituée par l'ensemble des interprétations et applications des de règles de droit réalisées par les tribunaux dans le cadre leur mission consistant à régler les différends.
La jurisprudence peut évoluer dans le temps, mais le contrôle exercé par la Cour de cassation dans l'ordre judiciaire et le Conseil d'État dans l'ordre administratif permet, en principe, d'unifier l'interprétation des textes à un instant donné.

2. La hiérarchie des sources internes du droit

a. Le contrôle de la constitutionnalité des sources internes du droit
Le contrôle de la constitutionnalité des lois est de la compétence exclusive du Conseil constitutionnel.
La saisine du Conseil constitutionnel ne peut être réalisée qu'après le vote du texte par le Parlement et avant sa promulgation par le président de la République.
Pour pouvoir exercer son contrôle, le Conseil constitutionnel doit être saisi par le président de la République, le Premier ministre, le président de l'Assemblée nationale ou du Sénat ou, depuis 1974, à l'initiative de 60 députés ou sénateurs.
Le texte de loi ou l'article déclaré contraire à la Constitution ne peut être promulgué. La décision du Conseil constitutionnel s'impose à tous et ne peut faire l'objet de recours.
Pour réaliser son contrôle de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a peu à peu étendu le bloc de constitutionnalité au-delà du seul texte de la Constitution de 1958, en visant notamment la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et le Préambule de la Constitution de 1946.
Il n'existe pas de mécanisme identifié de contrôle de la constitutionnalité des textes réglementaires d'application.

b. Le contrôle de la légalité des textes réglementaires d'application
Ce contrôle de la légalité est exercé par les juridictions d'administratives et notamment le Conseil d'État.
L’action engagée peut être basée soit sur le non-respect des règles de forme, de compétence ou de procédure (question de légalité externe) ou sur le non-respect des conditions de fond et notamment sa contrariété avec la loi (question de légalité interne).
Les textes réglementaires sont eux-mêmes hiérarchisés : les décrets s'imposent aux arrêtés ministériels, préfectoraux et municipaux.
L'absence ou le retard dans l'adoption des textes réglementaires d'application ne peut donner lieu à aucune action en justice.

c. La place des autres sources du droit dans la hiérarchie
La coutume, source non écrite du droit, est située au plus bas de la hiérarchie des sources du droit : elle peut être écartée par toute source écrite du droit.
Les conventions collectives doivent traditionnellement respecter les dispositions légales, réglementaires et conventionnelles. Elles peuvent, toutefois, y déroger dans un sens favorable au salarié (principe de faveur).
La jurisprudence n'est pas une source directe du droit : elle doit respecter toutes les dispositions prévues par les sources internes, écrites ou non écrites.

Les sources communautaires Européennes et Internationales du Droit

Le développement des sources internationales, européennes et surtout communautaires du droit s'accompagne d'une interrogation sur les liens hiérarchiques que ces sources entretiennent avec le droit national.

1. La diversité des sources non internes du droit

a. Les sources internationales du droit
L es traités et les accords sont conclus entre États dans le but d'organiser leurs relations ou celles de leurs ressortissants. L'entrée d'un traité dans le système juridique national suppose que la signature soit suivie de la procédure de ratification. La ratification est un acte réalisé par le président de la République. Cependant, dans le cas d'un traité visé par l'article 53 de la Constitution (traités de paix, de commerce, ceux qui engagent les finances de l'État, ceux qui modifient des dispositions de nature législative_) la ratification doit être autorisée par le vote d'une loi par le Parlement. Avant la ratification, le Conseil constitutionnel peut être saisi pour apprécier la compatibilité entre le traité et la Constitution. Si tel n'est pas le cas, la constitution doit être révisée avant toute ratification du traité.
Le droit international est un droit où la coutume continue à occuper une place importante. Les décisions des juridictions créées par traité, comme la Cour internationale de justice ou la Cour pénale internationale contribuent à l'élaboration d'une jurisprudence internationale.

b. Les sources européennes du droit
La Convention européenne des droits de l'homme, signée en 1950, est un traité centré sur la protection des droits de l'homme au niveau du continent européen. La jurisprudence correspondante résulte des décisions de la Cour européenne des droits de l'homme, située à Strasbourg.

c. Les sources communautaires
Le droit communautaire est principalement composé des traités (droit communautaire primaire ou originaire), du droit dérivé (droit élaboré par les institutions de l'Union européenne, soit le règlement, la directive, la décision et les actes non contraignants), des traités conclus par l'UE. Le règlement communautaire, en vertu du mécanisme d'applicabilité directe, s'intègre automatiquement et de manière identique dans les différents systèmes juridiques nationaux.
La directive communautaire nécessite une transposition par le législateur national. Elle fixe les objectifs que chaque système juridique national doit atteindre pour assurer une certaine harmonisation, mais chaque État reste libre et maître des moyens de mise en oeuvre.
La Cour de justice des communautés européennes, en interprétant les différentes sources, élabore une jurisprudence communautaire.

2. La place des sources internationales du droit dans la hierarchie des sources internes du droit

a. Le principe posé par l'article 55 de la Constitution
En vertu de cet article, « les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie ». L’article 55 s'applique avant tout dans les relations entre les sources internes d'un côté et les sources internationales ou européennes de l'autre. La primauté du droit international ou européen sur le droit national est affirmée par la Constitution sous la double réserve de la ratification et de la réciprocité. Le Conseil constitutionnel refuse de censurer une loi pour violation de l'article 55 de la Constitution en raison d'une contrariété avec un traité existant. Ce sont les juridictions administratives et judiciaires qui tirent les conséquences des dispositions de l'article 55 de la Constitution en écartant en principe les textes issus de sources internes contraires à des traités. Plusieurs décisions traduisent cependant une certaine réticence à appliquer les textes internationaux proclamant des droits et libertés individuels ayant pour effet d'écarter l'application de sources nationales fondées sur la protection de l'intérêt général.

b. Les relations entre le droit communautaire et le droit national
Les relations entre les sources communautaires et internes sont plus complexes que celles qui résultent du seul article 55 de la Constitution.
La Cour de justice des communautés européennes fait respecter le principe d'applicabilité directe du droit communautaire, qui assure, sauf exception, la fusion entre le système juridique communautaire et les systèmes juridiques nationaux : les dispositions communautaires issues des traités peuvent, si elles sont suffisamment précises, être directement invoquées. La Cour de justice des communautés européennes fait également respecter le principe de primauté du droit communautaire sur les droits nationaux. Cette primauté conduit, en cas de contrariété entre les deux sources, à écarter systématiquement la disposition nationale.
Dans le cas des directives non transposées dans les délais impartis, le principe d'applicabilité directe et de primauté a conduit la Cour de justice des communautés européennes à affirmer un principe d'effet direct si les dispositions de la directive déterminent les droits des personnes de manière suffisamment claire et précise. Il est alors possible d'invoquer contre l'État l'application de la directive non transposée au détriment de la disposition nationale (effet direct vertical).
La Cour de justice des communautés européennes n'applique pas la directive non transposée dans les rapports entre particuliers (effet direct horizontal). Mais une action en justice contre l'État défaillant aboutissant au versement de dommages-intérêts en réparation des conséquences de la non -transposition peut être engagée.